mardi 4 septembre 2012

J'apporte mon soutien au maire de New York Michael Bloomberg



Aux États-Unis, le surpoids et l’obésité touchent 60 % des adultes et plus d’un enfant sur trois. 
Alors que l’OMS a désigné l’obésité comme la 5e cause de mortalité dans le monde, le maire de New York  Michael Bloomberg a décidé de lutter contre le fléau. Parmi les mesures proposées, celle visant à limiter la consommation de boissons sucrées à New York fait l’objet d’une âpre bataille entre la Mairie et les lobbies agro-alimentaires. Mais c'est une mesure pionnière pour lutter contre l'obésité.

Les études épidémiologiques et cliniques ayant mis en évidence une corrélation positive entre la consommation de boissons sucrées et le surpoids, le maire de New York souhaite en effet interdire la vente de sodas de plus d’un demi-litre dans les restaurants, fast-foods, cinémas et distributeurs de boissons de la ville.

La décision finale revient à la Commission de la Santé de la ville, qui se prononcera le 13 septembre sur cette proposition.

Souhaitant bénéficier du soutien de figures d’autorité en matière de nutrition, Michael Bloomberg a fait notamment appel à moi, et j'ai immédiatement soutenu sa démarche.

« Le duo sucre / insuline est désormais identifié comme le grand coupable du surpoids dans le monde. À partir d’une certaine quantité, le sucre ne peut être stocké dans le corps que dans les tissus adipeux, ce qui veut dire qu’il se transforme directement en graisse.
Si nous voulons lutter efficacement contre le surpoids et l’obésité, nous devons être déterminés à limiter la consommation de glucides, qui est d’autant plus dangereuse qu’elle crée une addiction. »

 Limiter la consommation de boissons sucrées est un premier pas dans la lutte contre le surpoids et l’obésité. En tant que médecin, j'apporte tout mon concours à la décision courageuse de Michael Bloomberg, qui j’espère inspirera d’autres mesures de ce type, aux Etats-Unis et dans le monde, à commencer par la France.  »

A propos de la polémique du "Daily Mail"


J'ai eu l'opportunité de rencontrer à Londres Liz Jones, l'une des journalistes et écrivain les plus connues du monde anglo-saxon. Nous avons longuement conversé sur de nombreux sujets relevant de ma vie de médecin et de mon combat contre le surpoids dans le monde. Ex-anorexique, elle était venue avec ses a priori et nous nous sommes quittés en grande affinité. Son interview a été publié dans un article de fond dans le journal de langue anglaise le plus diffusé au monde, et dans un supplément de week end touchant plus de 30 millions de lecteurs.
De cette large interview, une journaliste française a extrait trois mots et en a fait un sujet de polémique. D'une certaine manière, cela me plait car ce que je dis est entendu et me permets d'approfondir ma pensée.
Qu'en est-il ? Liz m'a demandé si j'étais choqué par les grands obèses américains. Je lui ai répondu : "Non, je souffre pour eux, j'ai de l'affection pour eux car, s'ils ne sont pas malades comme ils le seraient du cancer, ils ressentent qu'ils sont marginalisés par leur société.
Puis elle m’a demandé si je les jugeais et j'ai répondu "Non, c'est comme s'ils étaient malades mais d'un problème psychologique et affectif. Je n'ai jamais vu d'obèse qui m'ait dit "je me sens bien dans ma tête". Puis j'ai ajouté que le fait de traverser une période heureuse arrête le besoin de compenser dans l'aliment. Ainsi, le fait de tomber amoureux réduit immédiatement votre prise d'aliments, c'est automatique."
Il est difficile d'ignorer que dans l'élaboration d'une obésité, les émotions, l'affect, le psychisme et le mental sont en cause. D'autant que l'anglais n'est pas ma langue maternelle et que les traductions modifient souvent le sens du discours.
Mais de là à titrer : "Pour Dukan, l'obésité est une maladie mentale" Est-ce bien raisonnable ?

J'aimerais profiter de cette occasion pour faire le point sur ce sujet de civilisation qui intéresse tant de personnes aujourd'hui. J'aimerais vous présenter deux acteurs du grand théâtre humain : l'individu et la société, deux structures relevant de deux niveaux d'organisation différents mais tous deux inséparables de la condition et de l'espèce humaines.

L'individu, vous ou moi, avons pour fondement le besoin et l'envie de vivre. Ce besoin émane d'un Pulsar de vie retranché au plus profond de notre cerveau archaïque et qui émet l'envie de vivre et l'énergie qui l'anime. Cette volonté primordiale se déploie à travers les comportements de recherche de la récompense tels  la sexualité, l'aliment, la réalisation sociale, le besoin de nature, celui du sacré, du beau, de l'appartenance au groupe. J'ai recensé ces dix grands besoins humains donnant lieu à récompense. Lorsque ces besoins sont satisfaits, une sensation de plaisir nait tandis qu'en profondeur est sécrété de la sérotonine qui par la dopamine interposé revient recharger le Pulsar de vie. La boucle est fermée et la vie se perpétue naturellement encadrée par ces médiateurs chimiques.

La société est normalement au service de l'individu mais depuis 1944, depuis les accords de Bretton-Woods, le monde a opté pour un modèle économique inédit, le dogme de la croissance indéfinie. C'est à l'échelle de la structure de l'individu, l'équivalent du Pulsar de vie. Pour que la Croissance se perpétue, il faut que la production croisse et que la consommation suive. Pour parvenir à faire consommer un consommateur gavé, il faut deux incitations: une incitation positive à adopter un nouvel objet à consommer qui s'effectue avec la puissance du markéting, de la publicité, de l'engagement des faiseurs d'opinion. Et une incitation négative qui consiste à déprécier les grands besoins fondamentaux comme la famille, le mariage, le sacré, le travail etc. qui ont le grand inconvénient d'être gratuits. Or ces objets de consommation inventés et bien ficelés ne fournissent qu'une satisfaction superficielle et éphémère. Mais surtout, ils doivent être acquis et payés avec le produit d'un travail qui n'est jouissif ou seulement satisfaisant que pour un nombre restreint d'individus.
Ce conflit entre l'individu qui cherche son bonheur en suivant la voie de ses choix d'espèce et une société qui veut vendre sa production afin de croitre sans fin, se solde aujourd'hui par la victoire de la société et le désarroi d'un grand nombre de sujets vulnérables qui trouvent refuge de survie dans l'aliment. C'est le triomphe de la Ruche sur l'Abeille.
Aujourd'hui, nul ne cherche à devenir obèse et s'il en existe autant, il faut admettre qu'ils le deviennent à leur corps défendant. Ils mangent au-delà de leurs besoins biologiques et prennent du poids en le détestant car ils ont besoin d'apaiser une souffrance plus intense que le fait de grossir. Et s'il existe 6.5 millions d'obèses aujourd'hui en France alors qu'il n'en existait pratiquement pas avant 1944, c'est que l'obésité est devenu un marqueur sociologique d'un malaise dans la société et de la souffrance mentale d'un grand, d'un trop grand nombre d'individus sacrifiés à cette religion du tout économique.

Ce constat d'échec est-il réversible, existe-t-il une solution ? Ma réponse est OUI. Si l'obèse accepte son handicap pour parvenir à recueillir le minimum de satisfaction, de plaisir et de sérotonine en deçà duquel la vie se décolore et passe en mode dépressif, il faut lui apporter ce plaisir sous une autre forme qui ne fasse pas grossir. J'en utilise trois.
La première est de lui permettre de maigrir, c'est plus grand de tous les plaisirs qu'il soit possible de lui offrir. Pour cela, il lui faut tout sauf un régime ou il doit compter ses calories et où il doit s'astreindre à ce dont il est incapable, l'équilibre, la mesure. S'il en était capable, il ne serait jamais devenu obèse et vouloir l'en convaincre est le meilleur moyen de le faire fuir. La deuxième est de l'aider à comprendre qu'il peut recoloniser certains grands besoins fondamentaux afin de retrouver la possibilité de s'épanouir autrement qu'en mangeant.
La troisième est d'adosser la lutte contre le surpoids à une cause plus large, celle de la reconquête de l'humanité perdue au cours de ces dernières décennies. On ne refait pas le monde mais chacun de nous peut entrer en résistance contre cette crise de l'épanouissement en s'y valorisant.